La construction est un processus particulièrement consommateur en ressources et en énergie. La construction d’une maison neuve nécessite en moyenne entre 200 et 400 tonnes de matériaux, soit environ 40 fois plus de matériaux qu’une rénovation. Le secteur de la construction, en Belgique, représente : 50 % des matières premières extraites et produites, 30 % de la consommation d’eau, 33 % de la production des déchets, 40 % de la demande en énergie.
Or, ces dernières années, la tendance est à raccourcir le cycle de vie des bâtiments : ils sont pensés et construits pour un usage précis et, si cet usage prend fin, le bâtiment est abandonné ou démoli. Les matériaux et l’énergie grise investis dans la construction sont ainsi gaspillés. La première priorité des prochaines décennies est de travailler à partir de l’existant, du déjà-là et de le transformer pour les nouveaux usages. La seconde est de construire des bâtiments neufs (quand ceux-ci sont vraiment nécessaires) en pensant dès leur conception leur capacité de transformation et de réversibilité. Il est donc indispensable de favoriser le maintien de l’existant, du bâti « déjà-là » (80 % du bâti de 2050 existe déjà !) et la rénovation de ce bâti. L’économie circulaire doit percoler des chantiers à la conception des bâtiments et des villes.
Notamment :
A) Établir réglementairement le principe de base de préservation des constructions existantes, sauf exception dûment motivée.
B) Imposer aux projets susceptibles d’entraîner une démolition-reconstruction la réalisation d’une note indiquant les raisons techniques ne permettant pas la rénovation ainsi qu’un bilan carbone comparatif avec un scénario de rénovation. Le cas échéant, garantir les principes de déconstruction dans une optique d’économie circulaire.
C) Appliquer une fiscalité immobilière différenciée, ayant pour objectif de stimuler l’entretien et la rénovation des bâtiments ; la TVA à 6 % repasse à 21 % pour la démolition d’immeubles. En cas de démolition, un taux de TVA réduit à 6 % est appliqué pour la réalisation des inventaires de substances dangereuses et de matériaux de réemploi et la déconstruction sélective des matériaux.
D) Promouvoir et développer les métiers de la rénovation auprès des jeunes et dans l’enseignement en CFWB.
E) Accompagner le secteur, former les travailleurs aux techniques propres à la déconstruction sélective, à la rénovation et au réemploi
F) Rendre obligatoire l’utilisation de l’outil TOTEM pour les projets publics dès 2025, généraliser l’utilisation de TOTEM pour tous les projets privés d’ampleur dès 2026.
G) Généraliser l’utilisation de l’outil GRO de la conception à la mise en œuvre de construction de bâtiments neufs ou de travaux de rénovation et en particulier pour la rédaction de critères de marché public (clauses axées sur la circularité, critères d’attribution, allotissement, etc.)
H) Dresser le bilan de la stratégie Circular Wallonia et la mettre à jour pour 2025 – 2030
Outre le travail à partir du bâti existant, sa transformation et rénovation, il est essentiel que les constructions neuves intègrent des principes de réversibilité et de démontabilité dès leur conception. De cette manière, en cas d’évolution des usages du bâtiment, celui-ci pourra être facilement transformé, sans démolition, et les friches de demain, évitées. Pour y arriver, Canopea recommande de :
A) Étudier les freins réglementaires à l’application des principes de la réversibilité des bâtiments (règlements d’urbanisme, rédaction des demandes de permis, etc.) et adopter les amendements nécessaires pour favoriser l’adoption massive des principes de la construction réversible, modulaire et démontable.
B) Appliquer la norme ISO 20887 : 2020 “ Développement durable dans les bâtiments et ouvrages de génie civil — Conception pour la démontabilité et l’adaptabilité — Principes, exigences et recommandations” pour la construction neuve de tout bâtiment public dès 2026.
C) Rédiger un référentiel reprenant les bonnes pratiques et points d’attention à prendre en compte.
D) Informer et former les professionnels de la construction aux enjeux et potentiels de la construction réversible et démontable.
Enfin, la construction neuve est en pleine réinvention : tant au niveau des matériaux (sourcés localement, éco-conçus, nouveaux ciments, etc.) que des techniques (démontabilité, isolation acoustique et thermique naturelle et performante, etc.). Pour Canopea, il est essentiel de soutenir ces secteurs pourvoyeurs d’emplois locaux de qualité tout en apportant une réponse à la crise environnementale.
A) Établir une fiscalité différenciée pour les éco-matériaux, matériaux biosourcés, locaux, issus d’entreprises EPD.
B) Travailler avec le Forem et Actiris pour accompagner les chercheur·euse·s d’emploi vers les secteurs de la construction et en particulier les métiers de la construction en pénurie (séance d’information et jobday spécifique, formation sur mesure (en particulier dans les domaines de l’écoconstruction et de la construction circulaire, etc.)
C) Travailler avec les centres de formation (université, hautes écoles, enseignement professionnel et technique, etc.) afin d’intégrer dans les cursus les nouveaux enjeux (inventaire de déconstruction, déconstruction sélective, sourçage des éléments de réemploi, écoconstruction, etc.) dans les programmes de formation.